2021-11-01

Arménie : les multiples dangers d’un nationalisme à distance

L’article de Maxime Gauin, chercheur au Centre d’études eurasiennes (AVIM), sur la diaspora arménienne a été publié sur le site d’actualités Atlantico, samedi 23 octobre.

Maxime Gauin note que la diaspora arménienne en France est “majoritairement constituée de personnes dont les ancêtres venaient de l’Empire ottoman ou de pays qui en sont issus — le Liban tout particulièrement — et qui n’ont donc ni la nationalité arménienne, ni même une connaissance approfondie de la situation de cette ancienne république soviétique”.

“En 1992, l’Arménie a envahi son voisin l’Azerbaïdjan, s’emparant non seulement de l’ex-république autonome du Haut-Karabakh (peuplée en majorité d’Arméniens ethniques, citoyens azerbaïdjanais) mais aussi de sept autres districts, qui ne comptaient qu’1 % d’Arméniens au recensement soviétique de 1989 ; sur l’ensemble des territoires ainsi occupés, pris en bloc, comme dans certaines villes du Haut-Karabakh, les Arméniens étaient minoritaires, à la veille de l’invasion. La majorité azérie, et plus généralement musulmane, a été éliminée, par l’expulsion et le massacre. Quatre résolutions du conseil de sécurité de l’ONU, adoptées en 1993, ainsi qu’une résolution de l’Assemblée générale, votée en 2008, ont exigé le retrait immédiat des forces d’occupation, en vain.

Ceux qui parlent au nom de la diaspora arménienne ont soutenu les éléments les plus nationalistes de l’Arménie, les ont encouragés à l’intransigeance, et au mépris de toutes les décisions qui viennent d’être citées. La conséquence inévitable est arrivée : plus peuplé, plus riche, soutenu par la Turquie, mais aussi par Israël, l’Ukraine, la Géorgie et la Hongrie, l’Azerbaïdjan a reconquis, l’an dernier, son territoire internationalement reconnu comme tel. Le Premier ministre arménien Nikol Pachinian a pu ainsi mesurer l’ampleur de ses erreurs et de ses fautes, ainsi que de celles de ses prédécesseurs. Sur une ligne toute différente, il a gagné les élections législatives de juin dernier. Or, les associations d’Arméniens en France comme outre-Atlantique demeurent, pour la plupart, hostiles à M. Pachinian, à cause de son évolution, et parlent de reprendre la guerre, ce qui serait catastrophique pour l’Arménie elle-même, mais pas pour leurs membres, qui parlent à leur aise depuis Paris, Lyon ou Marseille”, écrit Maxime Gauin.

L’historien fait remarquer que certains journalistes et politologues français ont été menacés par des Arméniens. “Les dirigeants de TF1 et Liseron Boudoul, journaliste de cette chaîne, ont été menacés de mort l’an dernier, l’un des appels au meurtre proposant explicitement d’imiter l’assassin de Samuel Paty. Un reportage avait déplu. Des journalistes collaborant à “Libération” ont été aussi menacés d’attentats par des fanatiques qui parlent de reconstituer l’Armée secrète arménienne pour la libération de l’Arménie (ASALA), connue notamment pour l’attentat d’Orly (huit morts ; la bombe devait exploser en vol et tuer ainsi 117 personnes) : ces journalistes avaient parlé des néonazis engagés du côté arménien. Encore plus récemment, en avril dernier, le politiste Bruno Tertrais a été diffamé sur Facebook par Armen Ghazarian, responsable de l’association arménienne Yerkir, pour avoir osé dire certaines vérités sur le conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan. Un commentateur a prôné le terrorisme homicide contre M. Tertrais. Il a fallu plusieurs jours, et l’affichage de ces horreurs, avec dénonciation à l’intéressé, pour que tout fût retiré. Cela ne devrait étonner personne, car des hommages aux terroristes kamikazes de Lisbonne (attentat-suicide de l’Armée révolutionnaire arménienne contre l’ambassade de Turquie au Portugal, en 1983) ont lieu chaque année, en toute impunité, sur le sol français.”

Gauin note que ces représentants de la diaspora arménienne sont régulièrement reçus par des élus français. “Ces réceptions nuisent à l’intérêt national français et à l’Arménie elle-même, qui a besoin de paix et de réconciliation.”

https://caucasefrance.com/2021/10/armenie-les-multiples-dangers-dun-nationalisme-a-distance/

 

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